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Validation d’un accord : pas besoin d’avocat en cas de litige lié à la consultation des salariés

Publié le 20/12/2023

La contestation relative à la consultation des salariés appelés à se prononcer sur la validation d'un accord d'entreprise minoritaire est liée au contentieux électoral. En conséquence, la représentation en justice par avocat n’est pas obligatoire, permettant ainsi de saisir le tribunal par voie de requête. C’est ce que juge la Cour de cassation. Cass.soc.16.10.2023, n°21-60.159.

Rappel des règles de validation des accords collectifs d’entreprise minoritaires

L’article L.2232-12 du Code du travail prévoit notamment qu’un accord collectif d’entreprise est valable s’il est signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives au 1er tour des dernières élections des titulaires au CSE. Si cette condition n'est pas remplie mais que l'accord a été signé par des organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives, ces syndicats peuvent demander une consultation des salariés visant à valider l'accord. L’accord est validé s’il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.

Cet arrêt va s’intéresser tout particulièrement à la procédure applicable en cas de contentieux relatif à la consultation des salariés…

Un syndicat dépose une requête pour contester la consultation des salariés…

En l’espèce, deux syndicats représentatifs ont demandé l'organisation d'une consultation des salariés afin de valider deux accords collectifs signés le 31 décembre 2020 par des organisations syndicales représentant plus de 30 % (sans atteindre les 50%) des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles. Il était donc nécessaire, pour valider ces accords, qu’une consultation des salariés soit organisée.  Un protocole d'accord relatif à l'organisation d’un référendum a alors été signé le 1er mars 2021, donnant lieu à un vote des salariés par voie électronique. Puis, suite à l'existence d'irrégularités dans le déroulement de ce scrutin, le tribunal judiciaire a été saisi d'une contestation de la consultation des salariés par voie de requête.


Pour déclarer irrecevable la requête, les juges du fond ont considéré que le litige ne relèvait pas de l'une des hypothèses pour lesquelles les parties sont dispensées de constituer avocat et que la procédure étant écrite avec représentation obligatoire, le tribunal ne pouvait être saisi que par voie d'assignation ou de requête conjointe (et donc non par requête simple…).

La requête est un écrit formalisé permettant de saisir un tribunal alors qu'une asisigation est un acte du commissaire de justice (anciennement acte d'huissier de justice) informant une personne qu'un procès est engagé contre elle et la convoquant devant une juridiction.

Le syndicat se pourvoit alors en cassation. Selon lui, il s’agit d’un contentieux légalement lié aux élections professionnelles. Il fait donc bien partie des cas pour lesquels la représentation par un avocat n’est pas obligatoire.

En cas de contentieux relatif à consultation des salariés en vue de valider un accord minoritaire, les parties doivent-elles être obligatoirement représentées par un avocat ?

Pas de recours obligatoire de l’avocat, la saisine par voie de requête autorisée

La Cour de cassation donne raison au syndicat et conclut ainsi :  « les contestations relatives aux consultations des salariés appelés à se prononcer sur la validation d’un accord d’entreprise, qui se déroulent dans le respect des principes généraux du droit électoral, sont formées par voie de requête, les parties étant dispensées de constituer avocat».

Elle arrive à cette conclusion après avoir énuméré les principaux textes légaux suivants :  

  • Elle précise que les contestations relatives à la liste des salariés devant être consultés et à la régularité de la consultation sont de la compétence du tribunal judiciaire qui statue en dernier ressort (1).
  • Elle relève par ailleurs que « le tribunal judiciaire est saisi par voie de requête des contestations portant sur l’électorat et la régularité des élections ainsi que sur la désignation des représentants syndicaux » (2).
  • Enfin, elle ajoute que les parties sont dispensées de constituer avocat pour les contestations relatives à l’électorat, à l’éligibilité et à la régularité des opérations électorales en ce qui concerne l’élection des membres de la délégation du personnel au CSE (3).

La Cour de cassation en déduit que le tribunal judiciaire qui a été saisi par voie de requête ne peut se déclarer irrecevable.

Pour la CFDT, la chambre sociale a choisi d’associer ce contentieux à celui des élections professionnelles, ce qui semble logique puisqu’il est ici question spécifiquement de la consultation/ du vote des salariés. Par ailleurs, en permettant d'échapper à la représentation obligatoire par avocat et de saisir par voie de simple requête, cette décision offre l'avantage de faciliter l'accès au juge.  

A l’inverse, s’il avait été question d’un contentieux lié à l’application de l’accord ou encore à sa validité (sans qu’il s’agisse d’un litige spécifiquement lié à la consultation des salariés), la représentation par avocat aurait alors été obligatoire et la saisine n’aurait pu se faire que par voie d’assignation ou de requête conjointe.

 

 

 (1) Art. R.2232-5 C.trav. et art. 211-3-17 COJ.

 (2) Art. L.2314-24 C.trav.

 (3) Art. 761 2° du CPC.

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