[Pays de la Loire] Secteur de la Santé : les Syndicats CFDT Santé-Sociaux des Pays de la Loire alertent sur la situation

Publié le 06/12/2021

Actuellement la population entrevoit de plus en plus les difficultés de fonctionnement du secteur de la santé que nos syndicats CFDT Santé-Sociaux dénoncent depuis plus de dix ans maintenant en alertant notamment sur la dégradation des conditions de travail et donc de la qualité de prise en charge des usagers.

Les médias se font de plus en plus l’écho des déserts médicaux et des fermetures de lits ou d’établissements. De la raréfaction de l’offre de soin en général.

Récemment c’est le conseil scientifique qui évoquait la fermeture de 20% de lits, rapidement minimisé par le ministère de la santé. La FHF (Fédération Hospitalière de France), elle, indiquait 6% de lit fermés pour plus de 60% en raison du manque de médecins ou de paramédicaux. A l’AP-HP on fait le constat de 1200 postes infirmiers non pourvu. Au CHU de Nantes les lits ferment également faute de bras malgré le fait que l’on offre des primes de 1000 et 800 euros pour des postes IDE et AS de nuit notamment. Les cliniques ont aussi recours à ces primes pour attirer les professionnelles de santé, mais cela ne suffit pas.

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Si les soignants n’avaient pas un haut niveau de conscience professionnelle, souvent au détriment de leur propre santé physique et psychique (augmentation des Risques Psycho-Sociaux et Troubles Musculo-Squeletiques) et si l’obligation de continuité de service dans le public ne permettait pas de déroger allégrement à la réglementation sur le temps de travail, ces fermetures de lits auraient été constatées depuis beaucoup plus longtemps.

Il est grand temps d’avoir un diagnostic partagé par tous (au moins au sein de la CFDT) afin de se mettre d’accord sur les maux et les remèdes à appliquer au secteur de la santé au sens large. Admettons la réalité de l’augmentation de la demande de prise en charge et la nécessaire adéquation des moyens. C’est un sujet très transversal et systémique qui ne peut une nouvelle fois être mis sous le tapis.

Mais cette thématique nécessite un certain consensus.

C’est pourquoi les Syndicats CFDT Santé-Sociaux des Pays de la Loire alertent sur :

  • Le fait qu’il faut arrêter de malmener en permanence l'hôpital public entre des successions de réformes, une trop grande mobilité des fonctionnaires (y compris des directions) et une forte hausse des contractuels toutes professions confondues. Il faut une pause réglementaire (réclamé d’ailleurs par le SYNCASS-CFDT* lors de son dernier Congrès), une analyse des impacts, de la stabilité et de la visibilité à 10 ans.
  • L’augmentation importante de l’activité du au vieillissement de la population et au nombre de malades chroniques plus nombreux. Les avancées médicales drainent plus de patients. Il faut aussi tenir compte de la hausse des exigences légitimes des usagers.
  • Le fait que la T2A (Tarification à l'Activité) génère une course à l’activité entre privé et public. Il faut un réexamen des conséquences trop négatives de celle-ci et un rééquilibrage avec les budgets « fixes » des missions de services publics.
  • Le manque d’audits pour évaluer les besoins en soin ainsi que les carences et atouts des territoires.
  • La nécessaire modernisation et numérisation du secteur.
  • Le fait que les augmentations budgétaires ne sont pas corrélées à l’augmentation de la demande de soins et des enjeux d’avenir.
  • Le fait que le passage aux 35 heures a complexifié et densifié les organisations de travail dans le secteur public car les temps de régulation jugés non-productifs ont été supprimés sans compensation.
  • Le fait que le déficit de prévention primaire dégrade les conditions de travail, génère une épidémie d’absentéisme et des sous-effectifs chroniques en plus d’une baisse d’attractivité.
  • Le fait que notre secteur majoritairement constitué de femme est un secteur où les salaires sont plus bas que la moyenne nationale et à secteur équivalent inférieurs à la moyenne européenne. Cela participe également à la baisse d’attractivité.
  • Le déficit de médecins qui génère des déserts médicaux et un engorgement des urgences.
  • La médecine de ville ne prend pas toute sa place dans l’amont des soins et il manque des structures en aval de l’hôpital. D’ailleurs en première mouture la loi HPST (Hôpital, Patients, Santé, Territoires) avait prévu une action plus coercitive vis-à-vis du corps médical qui a été retirée grâce au lobbying de celui-ci.
  • Il y a un réel déficit quantitatif médical public malgré le plafonnement des rémunérations des intérimaires (jusqu'à 5 fois les prestations de garde PH) pour éviter une concurrence néfaste entre hôpitaux au détriment des petits établissements de proximité. Il faudrait revaloriser l'attractivité des métiers de PH (Praticiens Hospitaliers) pour qu'ils restent à l'hôpital et parallèlement qu'il y ait une forme d'obligation à collaborer positivement au sein des GHT (Groupement Hospitaliers de Territoires), seule façon pour l'instant (les aménagements récents du numérus clausus ne verront leurs effets que dans dix ans) d'éviter la fermeture transitoire ou définitive des petits hôpitaux. De la même manière pour les médecins libéraux, il faudrait arriver à une forme de contrainte sur la répartition d’exercice afin d'éviter les déserts médicaux mais aussi favoriser une collaboration où un partenariat plus accru avec les hôpitaux publics. Ce que se refusent de faire pour l'instant les syndicats de médecins libéraux et les lobbies. La notion de contrainte est forcément mal vécue par le corps médical, c’est pourquoi il faut l’associer à cette régulation. Il faudrait qu’ils soient à l’initiative et partie prenante de ces réflexions car les nouveaux médecins n’ont plus les même aspirations et modes de fonctionnement que leurs ainés. C'est une partie de la solution, avec la stabilité, la lisibilité et le deuxième étage à venir du Ségur, pour que l'hôpital aille mieux d'ici quelques années.

 

Pour le versant paramédical, dans un contexte de grande fatigue la Covid-19 a révélé au grand jour les failles du système.

A cette occasion les soignants ont vu l’hypocrisie de la situation, ils ont compris que l’on exigeait d’eux des sacrifices que beaucoup ne prônaient pas pour eux-mêmes. Dans ce contexte il ne faut plus s’étonner de rencontrer des difficultés de recrutement ou une augmentation des départs et des démissions.

On ne peut plus demander aux soignants de retourner au front alors qu’ils se sont aperçus qu’ils étaient désarmés.

Il est dommage de voir l’indignation populaire uniquement lorsque l’offre de soin se réduit alors même que c’est le seul moment où les soignants voient la charge de travail se mettre en adéquation avec les moyens disponibles. Les applaudissements ont cessé une fois la peur disparue.

C’est triste, mais en effet les fermetures de lit permettent d’enfin respecter la réglementation sur le temps de travail (repos, heures supplémentaires, etc…).

Cela fait trop longtemps que la doctrine de limitation des budgets des ressources humaines fait ses ravages. A cause de la demande de rationalisation des coûts de santé pourtant nécessaire nous constatons que l’hôpital dégrade la santé de ceux qui y travaillent au point de faire fuir les compétences et vocations.

Alors même que les établissements sont régulièrement certifiés par l’HAS (Haute Autorité de Santé), en interne on regrette de produire de la « non-qualité ». Les enveloppes budgétaires actuelles ne permettent plus de donner du sens à des métiers qui en exigent pourtant à chaque instant. Elles ne permettent même pas de corriger les injustices salariales qui frappent notamment le secteur du social et médico-social.

Le Ségur de la santé a permis de palier à l’urgence mais toutes les problématiques de fond comme la surcharge de travail absorbée par le dévouement des soignants émergent maintenant au grand jour.

L’axe 2 du Ségur de la santé se propose d’aborder en partie les problèmes de ressources humaines mais on voit déjà que les crédits octroyés à certaines régions dont les Pays de la Loire ont été rabotés au profit d’autres territoires.

Il faut bien comprendre que la pandémie actuelle peut être la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Aujourd’hui les équipes sont fatiguées et ont besoin de récupérer physiquement et psychologiquement. Le travail à flux tendu ne passe plus. Malheureusement de moins en moins de personnes souhaitent travailler dans notre secteur et les contrats de remplacement se font rares.

Dans la perspective de la prochaine campagne présidentielle, Il faut absolument faire du financement de la santé un débat majeur. Cette question comme cela a été le cas pour le financement de la dépendance ne peut plus être reporté à demain sous peine de voir tout un système de soin s’effondrer sur lui-même.

Nous réclamons pour les salariés et agents l’adéquation des moyens avec les missions.

Pour renforcer l’attractivité nous avons besoin de meilleurs salaires.

Il faut également une réelle qualité de vie au travail (cela passe nécessairement par la fixation de ratios soignants/soignés plus élevés définis par un cadre national et par une politique de prévention et de réduction d’exposition aux risques professionnels digne de ce nom) afin s’il est encore nécessaire de le rappeler, de garantir une réelle qualité d’offre de soin et de prise en charge pour toute la population.

 

* SYNCASS : Syndicat des cadres de direction, médecins, chirurgiens-dentistes et pharmaciens des établissements sanitaires et sociaux publics et privés

 

Retrouvez ci-dessous l'article de Ouest-France suite à la conférence de presse